Comment alléger son impôt en cas de perception d'un revenu exceptionnel ?

Le système dit "du quotient" permet au contribuable qui a perçu un revenu exceptionnel par sa nature et par son montant d'atténuer le poids de l'impôt sur le revenu. Le calcul est opéré par l'administration fiscale, uniquement sur demande expresse du contribuable.

La perception d'une très grosse prime ou le versement d'une indemnité consécutive à la rupture d'un contrat de travail ou lors du départ à la retraite peut entraîner, pour celui qui la reçoit, une imposition dans les tranches les plus hautes du barème de l'impôt sur le revenu. Pour alléger la note, la loi prévoit un dispositif particulier d’imposition appelé "système du quotient". Le mécanisme ne permet pas de retarder ou d’étaler le paiement de l’impôt sur plusieurs années mais il atténue l'effet de la progressivité du barème, avec à la clé, parfois, une économie d'impôt. Celle-ci est surtout visible quand le revenu exceptionnel entraîne un basculement dans la tranche supérieure du barème d'imposition. Dans tous les cas, le résultat n'est jamais en défaveur du contribuable. Au pire, le gain est neutre.

Précisons au préalable que seuls peuvent bénéficier du système du quotient les revenus qui sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Sont donc exclus les revenus taxés à un taux proportionnel et les revenus qui, en raison de leur nature, sont déjà susceptibles de bénéficier de régimes spécifiques de quotient ou d'étalement (par exemple, les plus-values professionnelles à court terme réalisées en cours d'exploitation).

Un revenu élevé n'est pas forcément exceptionnel

La législation fiscale fixe deux critères pour que le ou les revenus exceptionnels perçus au cours d'une année soient considérés comme tels par le fisc.

Premièrement, les revenus exceptionnels sont des revenus qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement. Entrent dans cette catégorie notamment :

  • les gratifications supplémentaires payées à un salarié pour services exceptionnels,
  • la prime de départ volontaire lorsque le salarié quitte l'entreprise sans faire l'objet d'un licenciement ou d'une mise à la retraite,
  • la fraction imposable d'une indemnité de licenciement ou d'une indemnité de rupture conventionnelle,
  • la plus-value de cession d'un fonds de commerce,
  • en matière de revenus fonciers, l'indemnité dite "de pas-de-porte" perçue par un propriétaire pour la cession d'un droit au bail
  • la plus-value de cession de titres de société réalisée lors du départ à la retraite d'un dirigeant de PME.

Par conséquent, les revenus réalisés dans le cadre normal d'une activité professionnelle ne sont pas susceptibles d'être qualifiés d'exceptionnels, même si cette activité produit des revenus dont le montant varie fortement d'une année sur l'autre. On pensera tout naturellement ici aux commissions perçues par un commercial.

Ne sont pas non plus qualifiés de revenus exceptionnels...

notamment :

  • les droits inscrits sur un compte épargne-temps qui donnent lieu à une indemnisation monétaire,
  • les revenus taxés d'office à défaut de précision sur leur origine,
  • les gains réalisés par un particulier dans le cadre de la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières.

Le deuxième critère de qualification retenu par l'administration fiscale repose sur le montant du revenu exceptionnel. En principe, l'application du système du quotient est possible uniquement si le montant perçu dépasse la moyenne des revenus nets imposés au titre des trois dernières années. Ainsi, pour un revenu exceptionnel perçu en 2023, il convient de faire la moyenne des revenus nets imposables de 2020, 2021 et 2022.

Précisons que le revenu exceptionnel s'entend du revenu mis à la disposition du contribuable. Dans le cas du salarié, par exemple, il sera pris en considération avant application de la déduction de 10 % au titre des frais professionnels.

Exemple

Un contribuable, dont les revenus imposables de trois années (2020, 2021 et 2022) se sont élevés respectivement à 46 000 €, 51 000 € et 53 000 €, soit une moyenne de 50 000 €, peut déclarer en 2024 un revenu exceptionnel et demander l'application du système du quotient uniquement si ce revenu dépasse 50 000 €.

Cependant, aucune condition de montant n'est exigée pour les revenus suivants :

  •  la fraction imposable des indemnités de rupture de contrat de travail : départ volontaire, licenciement, retraite, préretraite,
  • la prime de mobilité versée lors d’un changement du lieu de travail,
  • les allocations pour congé de conversion capitalisées et versées en une seule fois,
  • les avances sur fermages perçues en cas de bail conclu avec un jeune agriculteur bénéficiaire d’une aide à l’installation,
  • les revenus agricoles exceptionnels.

L'application du système du quotient est optionnelle

Le système du quotient est optionnel : le contribuable est libre d'en faire la demande ou non. Pour en bénéficier, il doit indiquer, dans une case du formulaire 2042 de la déclaration annuelle des revenus prévue à cet effet, le montant total des revenus à imposer selon ce système, en précisant la nature et le détail des revenus et, le cas échéant, le membre du foyer fiscal qui en était le bénéficiaire. Les revenus à imposer selon le système du quotient doivent bien évidemment être déduits des autres revenus déclarés. Le cas échéant, la case préremplie doit donc être corrigée.

Bon à savoir

À défaut d'être demandée lors de la déclaration des revenus, l'application du système du quotient peut l’être ultérieurement par voie de réclamation.

Avant de faire sa demande, le contribuable ne doit pas hésiter à faire des simulations sur le site de l’administration fiscale — www.impots.gouv.fr — pour vérifier si l'option est intéressante pour lui, car le calcul proprement dit revient à l'administration fiscale. Le contribuable bénéficie néanmoins d’un droit à l’erreur. En effet, lorsqu’il demande à tort l’application du système du quotient sur sa déclaration de revenus, l’administration procède à la requalification des revenus au moyen d'une proposition de rectification.

Un calcul en quatre étapes

Le calcul consiste à distinguer le revenu exceptionnel du revenu "ordinaire" et se décompose en quatre étapes.

Dans un premier temps, l'administration soumet le seul revenu "ordinaire" au barème progressif avec prise en compte des éventuelles déductions et des charges de famille (résultat 1).

Deuxième étape : le même calcul est effectué sur la base du revenu "ordinaire" majoré du quotient (résultat 2). Le quotient s'obtient en divisant le montant du revenu exceptionnel par 4.

La différence entre le résultat 2 (impôt afférent au revenu "ordinaire" majoré du quotient) et le résultat 1 (impôt afférent au seul revenu "ordinaire") est multipliée par 4. Le résultat 3 donne l'impôt supplémentaire correspondant au seul revenu exceptionnel.

L'addition du résultat 1 et du résultat 3 donne le montant total de l'impôt, auquel l'administration appliquera s'il y a lieu les diverses corrections prévues par la loi : décote, réductions d'impôt, etc.

 

Exemple 1

Exemple 2

Exemple 3

Composition du foyer fiscal

Couple marié
 + 1 enfant à charge,
 soit un QF (1) égal à 2,5

Couple marié
 sans enfant à charge,
 soit un QF (1) égal à 2

Couple marié
 + 1 entant à charge,
 soit un QF (1) égal à 2,5

Salaire 1 + prime mobilité (2)

39 000 € + 20 000 €

55 000 € + 16 000 €

55 000 € + 25 000 €

Salaire 2 (2)

39 000 €

0 €

50 000 €

Revenu net imposable hors prime (3)

70 200 €

49 500 €

94 500 €

IR 1 (4)

4 617 €

3 074 €

11 566 €

Revenu net imposable (incluant 1/4
de la prime) (3)

74 700 €

53 100 €

100 125 €

IR 2 (4)

5 626 €

3 470 €

13 253 €

IR 2 - IR 1

1 009 €

396 €

1 687 €

Impôt afférent à la prime mobilité

1 009 x 4 = 4 036 €

396 x 4 € = 1 584 €

1 687 x 4 = 6 748 €

IR dû (IR 1 + impôt afférent à la prime)

4 617 + 4 036 = 8 653 €

3 074 + 1 584 = 4 658 €

11 566 + 6 748 = 18 314 €

IR total sans application du système du quotient

9 676 €

6 357 €

18 316 €

Économie d'impôt

1 023 €

1 699 €

2 €

(1) QF = quotient familial.
 (2) Perçu en 2023.
 (3) Salaire(s) imposable(s) après application de la déduction de 10 % au titre des frais professionnels.
 (4) Application aux revenus 2023 du barème de l'impôt sur le revenu 2024 issu du projet de loi de finances pour 2024.

 

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